Découvlire Nouvelle circulaire n°10, Carburateur

  • Par sautize
  • Le 01/04/2022
  • 0 commentaire

Nouvelle circulaire n°10, Carburateur

Ce n’est pas tous les jours qu’un carburateur retient mon attention, un beau et gros carburateur qui n’est plus à sa place. Extrait pour raison d’usure ou de malformation du véhicule automobile inconnu, il en est réduit à l’état de rampant. Il assure néanmoins le soutien de l’édifice, y jouant même un rôle virtuel de propulseur. Le dôme de couleur bleu, qui a pris la place de la cuve d’origine, vient en rompre la grisaille. La clef en son milieu équilibre les songes. De ses durites et autres orifices, se dressent différents corps.

Sans d’autre motif que le seul mot de carburateur, je me souviens d’un livre lu il y a quelques années, paru en 2010 aux Etats-Unis, dont le titre est Eloge du carburateur. Réflexion philosophique sur le travail, pamphlet contre les formes modernes et dévoyées de son organisation, plaidoyer en faveur du travail dit manuel, les propos de son auteur, Matthew Crawford, me réjouirent. La ligne de partage n’est pas entre travail intellectuel et travail manuel. Elle est dans le dessaisissement de l’accomplissement de la tâche, la réduction de la place assignée à son auteur, le travailleur, dans la chaîne de production. Matthew Crawford y racontait notamment comment il fut amené à ne pas choisir entre une carrière universitaire en philosophie et la réparation des motos. Surmonter des obstacles, trouver des solutions aux problèmes, agir en responsabilité et dans la complexité, c’est à coup sûr accéder au plaisir et au bénéfice tant intellectuel que psychique que procure le travail, quel qu’il soit. Il y aurait beaucoup à dire. Revenons à notre carburateur.

Remontant dans le sens contraire des aiguilles de l’horloge, on trouve un débitmètre de pression, autrement appelé manostat. Tube et tige et bras levé confèrent à l’ensemble un port altier auquel les deux tubulures de raccordement du manostat ajoutent un air martial, aussitôt démenti par le bolduc rose, ce ruban frise du ridicule, comme une langue tirée trop bien pendue ou la queue en tire-bouchon du cochon.  L’œil est là. Œil redoublé devrait-on ajouter, puisque le bolduc s’engage dans une gorge profonde qui n’était autre précisément qu’un œil de pioche, ce bout d’outil dans lequel le manche est engagé. Restons sur cette gorge pour ne conserver qu’un seul œil. Serait-ce ainsi qu’il faut voir ou être vu par la sphère de verre ? Ce n’est pas l’œil du cyclope ou tout autre verre d’Homère, non plus la bulle de savon ou la boule de Noël. C’est un phare gélifié tout simplement, dans sa transparence. Ambiance. La suite n’est que courbes et méandre composant une forme aviaire tenue à bout de bras par un passant de Crémone. L’histoire est à reprendre.

St276

 

Ajouter un commentaire