Découvlire Nouvelle circulaire n°13, Homme préssé

  • Par sautize
  • Le 15/02/2022
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Nouvelle circulaire n°13, Homme pressé

Au premier regard jeté sans ménagement, ou négligemment posé sur la nouvelle Nouvelle circulaire, il semble bien inutile d’y joindre quelques lignes, comme d’ajouter des mots aux maux. Les éléments qui la constituent sont si explicites qu’il en faudrait de l’imagination, trempée dans une mer d’optimisme, pour ne pas voir le drame qui se joue métaphoriquement sous nos yeux. Arrêt sur image d’une image sans fin. La cuillère est centrale, elle recueille le fruit de l’homme pressé qui fut autrefois porte-mèche d’un vilebrequin. Il serait tentant d’établir un lien avec ma propre histoire. Je préfère me rapprocher d’une œuvre d’il y a quelques années intitulée « L’homme révolté ». Le principe en était le même quoique les ingrédients en fussent différents ; une quinzaine de bonhommes s’agitaient dans la cuve en entonnoir d’un vieil hachoir à viande manuel. A sa sortie, des lambeaux et un tas de fer sanguinolent. Sur le manche de la manivelle en position verticale, un homme debout, le poing levé. Vous et moi étions encore jeunes. Ici l’homme pressé est bien seul et constate, avec effroi sans doute, que ni le parachute ascensionnel ni les cartes en main ne lui sont d’un grand secours…

Pure hypothèse cependant ! Il n’est pas dit que l’inverse ne se produisît, que l’homme n’échappât dans un sursaut à la découpe en règle, brandissant du dessous les cartes d’un nouvel horizon ou décrochant la lune et quelques nuages. Le contenu de la cuillère ne serait qu’un leurre, ou un repoussoir. D’ailleurs, pour étayer cette deuxième piste, suivez mon regard et celui de la tête en coffre de serrure ouvert à moitié, au fouillot doré en guise d’œil et au bec en pêne demi-tour, de ce drôle de volatile rencontré en d’autres contrées. Comme se plaît à le dire les enfants, « il fait le beau sur son vélo », si l’on peut parler ainsi du deux-roues vraiment très sommaire qui porte le volatile en question et la suite de l’histoire. Avant cela, je note l’intéressant contraste entre d’un côté les formes rectangulaires de la demi serrure et son pêne demi-tour et, de l’autre, les courbes en fers plats et carré qui se succèdent et dessinent le corps du volatile.

Le regard, disais-je, est dirigé vers le haut. Certains citeraient le ciel et d’autres encore un dieu. Ainsi parlait Booz dans le rêve et l’extase, Tournant vers Dieu ses yeux par le sommeil noyés. Quelqu’un me fit remarquer que j’invitais souvent ce personnage biblique à la table des illustrations. C’est exact, mais dans sa version revisitée par Victor Hugo.  J’aime à réciter ce long poème de La Légende des siècles, sous l’œil pétillant de son auteur. Booz est un paysan et un patriarche prospère qui reçoit, la nuit, la visite de Ruth. De cette rencontre surgira une descendance, malgré le grand âge de Booz… Pendant qu'il sommeillait, Ruth, une moabite / S'était couchée aux pieds de Booz, le sein nu / Espérant on ne sait quel rayon inconnu / Quand viendrait du réveil la lumière subite. Ce poème fait partie du « garde-à-manger poétique » auquel j’eus recours (et je cours encore), pour me sortir de situations périlleuses, insomnies, réunions, traversées de toutes sortes du désert au quotidien. Il n’est donc pas impossible que l’homme pressé soit en mesure de s’extraire du pressoir à hélice par la seule évocation de Booz, n’en déplaise à cette forme en noir que notre vive imagination traduit en mauvais génie qui siphonne la marmite. Le mystère demeure quant à la boule dorée qu’il balance à la manière d’un encensoir.

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